Coup de projecteur sur un éleveur
Virgile Alexandre et son élevage « El Campo »
A force d’entendre dire : « On va au campo, on vient du campo, on ira… » Cette petite phrase, courante en pays d’Arles, est devenue le nom de la ganaderia de toros bravos qu’élève Virgile Alexandre. Virgile, en bon Camarguais et Arlésien, préfèrerait manadier de taureaux de combat, mais on ne va pas lui chercher la petite bête…
Depuis 2012, ce qui est peu dans l’histoire d’un élevage, il possède vaches et sémentales achetés au docteur Jean Gauthier qui, lui aussi, s’était lancé dans l’aventure de l’élevage de bovins en achetant en 1980 des vaches à Juan Mari Perez Tabernero Montalvo et un étalon à Don Arturo Cobaleda (Barcial), les fameux et redoutés « Patas blancas » dont le sang Vega-Villar a aujourd’hui pratiquement disparu.
Pas facile comme choix pour un jeune éleveur. Les « Cobadelas » n’ont jamais été les toros favoris des grandes vedettes de la tauromachie. Ils ont un sacré caractère qu’il faut savoir dominer. Mais Virgile aime les difficultés et les obstacles à vaincre. Il a tenté d’être raseteur et torero mais il s’est vite rendu compte qu’il avait plus d’avenir en devenant éleveur et en continuant son métier de maçon que de s’opposer aux « bious ».
Sa passion est venue tout simplement : « J’ai toujours aimé les taureaux et les toros et, étant très proche de la famille Colombeau, j’ai pu beaucoup apprendre de ce métier. Puis j’ai eu l’opportunité d’acheter les bêtes du docteur Gauthier et j’ai commencé l’aventure voilà cinq ans. En capea, j’ai des résultats encourageants. » Au mois de mars, il aura une première opportunité de présenter 4 becerros dans les arènes de Vauvert à l’occasion du Printemps des jeunes aficionados organisé par la Coordination des clubs taurins de Nîmes et du Gard mais également de faire tienter un « macho » par Javier Cortes, le prometteur torero apoderé par Stéphane Fernandez Meca. Un étalon de belle allure qu’il nous a fait découvrir, à Raphèle, sur la propriété de Gilbert Aymes, ancien ganadero arlésien qui a possédé, pendant 45 ans, des « Patas blancas » de son élevage « la Ganaderia cévenole. »
« C’est un animal que j’ai vu naître et que je connais bien. Je sais comment il se comporte. On verra bien mais j’ai confiance en lui pour cette épreuve avec trois autres éleveurs. »
Là, sur ce domaine de plus de cinquante hectares paissent les mâles et les trente vaches de ventre et les becerros qu’accompagnent 8 taureaux de race Camargue qui serviront de simbeù. Tous sont séparés par des barrages fonctionnels dressés patiemment depuis que la famille Aymes possède ce domaine et qui permettent de passer d’un pâturage à l’autre. Et dans un corral, les jeunes veaux sont à l’abri des intempéries. « Il n’a pas fait assez froid et les insectes ou les vermines n’ont pas été éliminés » critique l’éleveur. Gilbert Aymes précise : « Le sarraiè a chanté plusieurs fois déjà… » Et rappelle les propos de son grand’père : « Quand le sarraiè canta, l’ivèr es acaba. » Même si l’herbe est abondante avec ce climat très humide, du foin venu de Langlade, en Vaunage vient compléter l’alimentation des bêtes qui se précipitent près de la charrette et du petit tracteur à double roues arrières qui permet de franchir les passages les plus difficiles. Les réservoirs reçoivent aussi un peu d’aliments secs et cette alimentation semble convenir parfaitement aux bêtes. C’est le torero nîmois Marc Serrano qui a tienté les premières vaches et, l’an passé, l’Arlésien Tomas Joubert. « Je me régale précise Virgile, de rechercher cet équilibre entre la sauvagerie originelle qui ira affronter le picador et la noblesse qui va permettre des faenas au torero. »
Ils ne sont pas nombreux à s’occuper de l’élevage. A part Virgile et Gilbert, Gilles qui a travaillé dans tous les élevages de la région, vient apporter ses conseils et donner un coup de main. Cet hiver, c’est l’arène de tienta qui va être repeinte et remise en état, puis, plus tard, on s’occupera du maset attenant la propriété. Et puis il faudra tienter les vaches, conduire les bêtes d’un parc à l’autre, à l’aide des chevaux Camargue qui attendent dans leur corral. « L’un passe devant, l’autre derrière et on conduit le troupeau ainsi sans problème. »
C’est cela la passion que Gilbert Aymes définit ainsi : « la passion, c’est beaucoup de temps, beaucoup d’amour mais on ne gagne jamais rien. »
En attendant le 20 mars pour connaître les résultats de cette passion, Virgile Alexandre est confiant et déjà fier du travail qu’il a accompli.
Dimanche 20 mars en matinée dans les arènes de Vauvert, Javier Cortes tientera un macho de la Ganaderia El Campo et dans l’après-midi Pierre Mailhan, Thomas Ubeda et Dylan Raimbaud seront opposés à 3 becerros de Virgile Alexandre, le 4e à Medhi Savalli.