Chaamaaacoooo...
Antonio Borrero Chamaco est attendu pour une soirée de la Robe Noire le 7 Février prochain au Moulin Gazay. Ces retrouvailles, après deux mois sans conférence, sont placées, comme le dit Paul dans l'article que nous publions infra, sous le signe de la fougue, la passion, le refus du danger, l'enthousiasme, la folie, même. Certains d'entre nous ont connu cette époque extraordinaire. D'autres en ont entendu parler, bien sûr. Pour tous, c'est une soirée au cours de laquelle le Maestro se souviendra de ces moments de tauromachie jamais plus vus depuis...
C'était une complainte, une ode, un aria, un cri venu du fond de la gorge d'un fumeur de Havane chaque fois que Antonio Borrero Borrero « Chamaco » apparaissait à la porte des cuadrillas, le cheveu hérissé comme la crête d'un coq en bataille. Et les aficionados qui emplissaient l'amphithéâtre comme on ne l'avait jamais vu pour une novillada n'avaient d'yeux que pour ce jeune homme qui n'avait jamais toréé à Madrid et qui venait à Nîmes avec ses dix-huit ans.
Pour cette première apparition en 1990, pour la feria des Mimosas, sous la bulle, le fils de Antonio Borrero Morano « Chamaco » allait révolutionner le monde taurin dans les années suivantes.
Quelques années avant, « Chamaco » père que l'on surnommait « le torero des dames » pour son charme était la coqueluche des aficionados catalans tant à la Monumental que dans les arènes du centre-ville devenue aujourd'hui un super marché. Il défiait les lois de la tauromachie, osait des terrains où jamais personne n'avait osé mettre la jambe. Il était la colonne vertébrale de la tauromachie de Barcelone où d'ailleurs il termina sa carrière en 1967 par une corrida triomphale.
Ce trémendisme, « Chamaco II » le portait dans ces gênes. Plus audacieux que El Cordobès, il sautait, dansait, s'enroulait, dans sa cape, de faisait « bachoucher », se relevait, toréait à genoux, de face, de dos, rendait les spectateurs fous. « Ils sont bons pour le docteur Pitot » assurait un vieil aficionado en sortant des arènes, en référence à l'hôpital psychiatrique nîmois.
Avant le 6 juin 1992, vêtu d'un costume apocalystique comme aurait dit Salvador Dali, dessiné par Christian Lacroix avec Paco Ojeda comme parrain et Fernando Cepeda comme témoin, « Chamaco » a dû se présenter une vingtaine de fois dans l'amphithéâtre romain et personne n'a oublié le mano a mano Jesulin-Chamaco récompensé par une tonne de trophées et qui a mis la ville à l'envers. Cette époque était bénie par tous ces jeunes génies : Sanchez Mejias, Obregon, Denis Loré, Finito de Cordoba, et Enrique Ponce qui montrait ses zapatillas.
Pourtant avec des airs de punk mal coiffé, plutôt godille que Hidalgo, ses parents l'avaient éloigné de Huelva et de la ganaderia de maman « Carmen Borrero ». Il est allé suivre des études en Angleterre, bon chic-bon genre. Mais la passion des toros l'a rejoint, un peu comme son père qui a débuté comme pâtissier avant de devenir millionnaire en tuant des toros.
Hélas la fougue, la passion, le refus du danger, l'enthousiasme, la folie n'allaient pas résister longtemps aux toros de quatre ans. Après une grave blessure, il s'assagit et ses contrats commencèrent à être moins nombreux même si l'on retient sa participation à une corrida de Palha à Nîmes ou la corrida d'alternative de Lionel Rouff, Morenito de Nîmes aux Saintes-Maries de la Mer.
« Chaamaaacooo », ce cri de guerre réapparut comme le jour où une petite rue de Nîmes, la rue des Patins (peut-être à cause des baisers qui s'échangeaient) devint la « Calle Chamaco ». Après une novillada triomphale et une faena d'un autre univers et terminée avec 2 oreilles et la queue d'un novillo de Jandilla.
Le bar du 421 était trop petit pour recevoir cette foule et voir le torero d'une époque découvrir cette plaque qui est d'ailleurs toujours scellée sur le mur.
En espagnol, chamaco renvoie à l'enfance et à l'adolescence, ce passage de gamin à l'adulte. Pour des milliers de Nîmois, des milliers d'aficionados, le torero « Chamaco » les a ramené vers ce détroit que l'on n'oublie jamais et où on aurait bien aimé rester.
Viva « Chaamaaacoooo ».
Paul Bosc
20 Janvier 2020