INDULTO
Par Charles CREPIN
Un eral grâcié lors de la novillada non-piquée le 15 avril organisée par la PRIMAVERA des AFICIONADOS. Je n'y assistais pas mais peu importe : cet événement, de portée modeste à priori, est loin d'être anodin et nous incite, en tant qu'aficionados, à nous poser quelques questions.
Et d'abord, que dit le règlement ? :
Article 84 du Réglement Taurin Municipal français ( http://www.uvtf.com/reglement-taurin/reg… ) :
Lorsqu'un animal aura mérité d'être gracié en raison de son excellente présentation et son excellent comportement dans toutes les phases du combat sans exception, notamment en prenant les piques avec style et bravoure, le Président pourra dans les circonstances qui suivent, accorder cette grâce afin que l'animal puisse être utilisé comme « semental », après les soins nécessités par son état physique et ses blessures, et participer ainsi à la préservation et l'amélioration de la race et de la caste de l'espèce.
La grâce devra être demandée majoritairement par le public ainsi que par le matador concerné qui en manifestera expressément le désir. Il sera de plus indispensable que le ganadero ou le mayoral de l'élevage concerné fasse connaître son accord pour l'intermédiaire d'un alguazil.
Article 73 – 11ème alinea
Aucun toro ne pourra obtenir la « vuelta al ruedo » (tour de piste post mortem) ou « l'indulto » (grâce du président) s'il n'a pas fait preuve d'une bravoure suffisante à la pique.
Toutefois, si une présidence de course veut absolument accorder l’indulto dans une course non piquée (pour diverses raisons que j’imagine…), elle peut toujours arguer qu’étant donné que le tercio de piques n'existe pas dans ces novilladas, les dispositions de l’article 73 ne peuvent s'appliquer. Et il n’y a pas de quoi en faire une maladie après tout, tant il y a par ailleurs des problèmes autrement préoccupants qui font dériver la corrida aujourd’hui.
Je suis tout de même interpelé par le fait :
- que cela se passe dans une grande place taurine, ce qui donne un certain relief à l'évènement,
- que cela se passe au cours d'une manifestation dédiée aux jeunes et à la transmission des valeurs de la Fiesta Brava. Récompenser un toro de 2 ans, 3 ans ou 4 ans sur le seul critère de la noblesse exprimée à la muleta me paraît éloigné du message à transmettre à la jeune aficion, et tout aussi éloigné des principes intangibles censés être enseignés aux élèves des écoles taurines. Je me demande ce qu’en ont pensé les maîtres qui assistaient à la course...
- que l’indulto « galvaudé » est un puissant argument exploité par ceux qui souhaitent l’avènement de la corrida « sin sangre », sans piques, sans banderilles, sans mise à mort.
- que l’indulto banalisé, serait, contre tout principe d’éthique, la voie ouverte à la grâce de tous les gentils petits toros qui feraient uniquement preuve de noblesse (et de sottise) durant ¼ d’heure de leur vie, d’autant plus souvent qu’il seraient opposés à des toreros talentueux capables de les faire tourner dans tous les sens, sans bouger un doigt de pied... Alors que d’un autre côté, la mort serait le châtiment suprême réservé à l’animal encasté, moins docile, rétif à l’exercice des « 100 passes », imposant sa lidia ? Absurde.
Voilà un des sujets que nous aurons tout loisir d’aborder au cours de nos soirées, l’hiver prochain.