Gallon à la Feria de la Crau

Publié le par Paul Bosc

Il s'appelait Aimé

Comment, avec un prénom pareil, aurait-il pu être un autre homme ? Aimé Gallon n'était que gentillesse, amabilité et ne connaissait que le sourire pour répondre à chacun. C'est l'image dont, sans doute, tous les aficionados se souviennent quand on évoque le fondateur de la ganaderia Aimé Gallon, le plus ancien éleveur de toro de combat français. Avec son épouse Isabelle, que tous surnommaient « Belou », il avait acheté, en 1956, la manade Lescot. Il y avait un peu de tout dans le lot de vaches et taureaux : des taureaux camarguais, des croisés espagnols, sans doute des Santa Coloma que l'on retrouve dans presque toutes les ganaderias du pays d'Arles et de Crau à cette époque.

Mais Aimé s'était fixé comme pari de faire ressortir la race pure espagnole pour créer un véritable élevage de toros de combat. Pour réaliser son rêve et faire vivre sa famille, il cultiva d'abord du riz puis du foin de Crau sur la propriété du mas d'Icard à Mas-Thibert et tenta l'aventure avec divers étalons d'origines Domecq. Dès 1957 il présente une novillada sans picador et une novillada piquée en 1958. Mais les résultats ne sont pas satisfaisants ou, tout au moins ne conviennent pas au rêve de ce « grand-petit homme ». Malgré des résultats remarquables comme cette novillada le 20 mai 1993 dans les arènes de Lunel où Ricardo Ortiz s'est illustré face à « Campero », en 1999, la maladie décime l'élevage et Aimé qui depuis 1972 a l'aide de ses fils Michel et Jean-Pierre achète deux sementales et une centaine de vaches aux éleveurs andalous Angel et Juan Antonio Sampedro, purs Juan Pedro Domecq.

Au mas d'Icard, ce qui reste de l'ancien élevage est séparé des Sampedro et le long travail de la sélection recommence. Les bêtes ont la bravoure et la noblesse mais la faiblesse gâche ou cache souvent ces qualités primordiales.

Enfin, en 2004, 2005 et 2006, la ganaderia Aimé Gallon et fils obtient des résultats satisfaisants notamment à Céret en corrida avec « Despierdito » ou à Tarascon où le novillo « Giraldito » gagne la novillada-concours et permet à Jérémy Banti de triompher. A Aire-sur-Adour, c'est « Opulento » qui gagne la corrida-concours.

Bien sûr Saint-Martin de Crau est aussi le théâtre de nombreux succès et on se souvient notamment de Morenito de Aranda face au toro « Desertierto » de Gallon en 2015 honorant ainsi le prix « Aimé Gallon » mis en compétition chaque année.

Aimé est parti, voilà dix ans et son épouse Isabelle l'a rejoint en 2015. Aujourd'hui Michel et Jean-Pierre mène la barque et leur descendance prendront bientôt les rênes de la ganaderia.

Un jour Michel racontait que son rêve serait de toréer à Séville, à la Maestranza.

Le chemin se dessine tout doucement avec cette triomphale corrida à Iniesta en août 2015 où 8 oreilles ont été coupées et « Odalisco » grâcié par Morenito de Aranda avec sortie en triomphe des éleveurs et des toreros Cesar Jimenez et Francisco José Espada qui revient dans les arènes de Saint-Martin cette année.

L'année dernière c'est à Navalcan le 15 août que les toros de Aimé Gallon et fils se distinguent avec encore Morenito de Aranda (2 oreilles et 1 oreille) ; Cesar Jimenez (2 oreilles et 2 oreilles) et Joaquin Galdos (2 oreilles et 2 oreilles), le quatrième toro effectue une vuelta posthume.

Pour la feria de la Crau 2017, le 30 avril prochain une corrida de Gallon est programmée avec Morenito de Aranda devenu une relation privilégiée entre les éleveurs et le torero de Burgos, Juan Leal, le torero arlésien et Francisco José Espada, triomphateur également de la corrida de Iniesta.

Un cartel que Aimé regarde, de là-haut, derrière ses grosses lunettes rondes, avec la satisfaction d'avoir réussi sa vie.

 

Paul BOSC

22/02/2017

 

Billet du Cercle N°26

Publié le par Charles CREPIN

Philippe Cuillé nous a quittés

Le souvenir de Philippe est pour nous celui d’un homme intègre, et le rappel d’un exemple à suivre : celui du respect du patrimoine et des valeurs de la famille, celui du respect des traditions et d’une pure aficion, celui, aussi, des valeurs d’amitié, de générosité et de fidélité maintes fois affirmées au fil du temps.

Si cette disparition m’affecte personnellement, il en va de même pour beaucoup d’entre nous au Cercle Taurin Nîmois. Car en effet, un lien particulier très ancien existe entre le CTN et Philippe ainsi que sa famille. Un lien symbolisé par Badon qui fut bien souvent le lieu privilégié de nos rencontres et le signe d’une convivialité et d’une amitié partagée autour d’une passion commune : « la fête du biòu et du toro ».

C’est sur cette terre de Camargue qu’a été forgée et pérennisée par quelques hommes et quelques femmes de caractère la tradition taurine que nous défendons. Les Cuillé, un groupe familial uni, un clan solide, est de ceux-là. Les enfants d’Eugène Cuillé, Jean-Pierre, Philippe, Françoise et Bertrand furent très tôt immergés dans la Bouvine. C’est Philippe qui, le premier, manifeste un goût prononcé pour les toros et caresse le rêve de devenir manadier. A 12 ans, il se fait offrir sa première vache comme cadeau de Noël...

Du rêve à la réalité, le fer des Cuillé deviendra célèbre, obtenant six « Biòus d’Or » (Rousset en 1981 et 1982, Pythagore en 2000, Guépard en 2010, et plus récemment Mignon, en 2015 et 2016.).

Au début des années 90, Jean-Pierre a récupéré les taureaux de Camargue qu’il installe sur les terres familiales à Générac. Philippe quant à lui conserve le Grand Badon et se tourne avec passion vers le «toro brave». Une belle aventure commence, semée d’embuches, mais aussi de grandes satisfactions à force de courage, de travail et d’aficion. Une carrière de ganadero récompensée en Janvier dernier par le prix CTPR de la meilleure novillada piquée pour l’année 2016. Après les Bióus d’Or, cette récompense consacre encore le talent et la passion des Cuillé, cette fois pour le toro bravo.

Dans un passé récent, plusieurs sorties du CTN à Badon, une soirée mémorable des Jeudis du Cercle animée par Jean-Pierre, Philippe et Benjamin, et notre dernière Assemblée Générale à l’occasion de laquelle la famille Cuillé était notre invitée d’honneur pour fêter la deuxième victoire de Mignon, ont conforté cette amitié et cette fidélité. C’est dire que la disparition soudaine de Philippe nous attriste profondément. Que Dominique son épouse, ses enfants et sa famille soient assurés qu’il gardera toujours une place particulière dans nos cœurs.

Voir aussi l'album JDC-Cuillé ici

Quelle honte, Pedrito !

Publié le par cercletaurin.nimois

Reverrons-nous bientôt des toros à Barcelone ? Contre toute attente, Pedro Balaña, propriétaire des arène dit NON.

Dans une lettre ouverte qu'on pourrait trouver drôle et amusante s'il ne s'agissait d'un sujet qui touche à notre passion, Salvador Boix, apoderado de José Tomàs dit ses quatre vérités à "Pedrito" Balaña.

Ci-dessous, un bref extrait de la missive que vous pouvez lire dans son intégralité en vous rendant sur le site de la FSTF ici

 Quelle honte Pedrito,

De quoi as-tu peur ? Peut-être t’a-t-on menacé ? Qui ? Où ? On t’a dit que si tu essayais, on regarderait dans des comptes courants et sous les sièges de tes cinémas et tu as pris peur ? Peut-être devrais-tu l’expliquer si ça s’est passé comme ça. Mais tu ne le feras pas et bien-sûr tu n’affronteras pas le danger parce que tu as peur et que tu manques de courage. Tu t’es toujours caché au lieu de réagir comme un homme, comme un être qui a de la mémoire et de la dignité. Tu te chies dessus et tu regardes ton portefeuille au point de trahir ta propre histoire et celle des gens qui t’ont respecté et qui t’ont permis de devenir riche... 

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TAUROMACHIE ET POPULISMES : LE BAL DES HYPOCRITES

Publié le par cercletaurin.nimois

Le 8 décembre 2016, Antonio PURROY était l'invité des JEUDIS DU CERCLE. Une brillante intervention dont nous publions ici les principaux extraits.

Les populismes, ennemis de la Tauromachie

De manière traditionnelle, la Tauromachie a vécu en Espagne à l’intérieur d’un climat prohibitionniste, prohibitions beaucoup plus dures que les actuelles, puisqu’elles étaient prescrites par des papes et des rois. Les deux plus importantes ont été celle du pape Píe V, avec la bulle De salutis gregis dominici de 1567, qui prohibait les fêtes de taureaux dans tout le monde catholique « parce que les fêtes de taureaux n’avaient rien à voir avec pitié et charité chrétiennes ». À l’époque l’église voulait protéger les personnes et éviter les orgies et les bacchanales qui s’organisaient autour des spectacles taurins.

L’autre grande prohibition a été celle du roi Charles IV par son Ordonnance Royale de 1805, qui instituait la « Prohibition absolue dans tout le Royaume, sans excepter la Cour, des fêtes de taureaux et novillos avec mise à mort ». Curieusement, cette prohibition a eu une validité légale durant presque deux siècles, jusqu’à ce qu’en 1991, le socialiste Philippe González étant président du Gouvernement espagnol, la loi 10/1991 sur « les Pouvoirs administratifs en matière des spectacles taurins et ses conséquences » ait été approuvée. Comme on pouvait s’y attendre, durant cette longue période antérieure les spectacles taurins ont continué d’être célébrés en long et en large sur notre « peau de taureau ».

Quelques années plus tard, en 2010, le Parlement de la Catalogne a interdit les courses de taureaux en Catalogne mais non les correbous, ce qui a constitué une grande hypocrisie. En effet, qui a dit aux hommes politiques catalans que les taureaux dans la rue souffrent moins que dans l’arène? Il vaut mieux que six ans plus tard le Tribunal Constitutionnel espagnol ait aboli la prohibition de la Catalogne, par ce qu’aujourd’hui la Tauromachie est parfaitement légale sur tout le territoire espagnol.

Les mouvements animalistes

Depuis quelques décennies, un nouveau mouvement essaie de faire irruption fortement dans le contexte international pour subvertir l’ordre établi et substituer à l’humanisme chrétien, où l’homme est le centre intellectuel et moral de la vie ordinaire, une nouvelle interprétation par laquelle les animaux irraisonnables possèdent la même importance que la condition humaine, ce qui, à l’évidence, paraît insensé.

Le promoteur principal de cette nouvelle croisade animaliste est le philosophe australien Peter Singer, formé à l’Université d’Oxford et qui exerce comme professeur de bioéthique à l’Université de Princeton aux USA. En 1975, il a publié le livre Libération animale qui est devenu la bible des animalistes, puisqu’il défend l’égalité morale entre humains et animaux, et arrive à affirmer que la mort a la même valeur pour les uns et pour les autres.

Le courant animaliste s’abreuve aussi aux sources de l’écologisme profond, celui qui participe du monde végétarien et du véganien. Les véganiens sont opposés à l’élevage du bétail, à son sacrifice dans les abattoirs et à la consommation d’aliments d’origine animale.

Ce nouveau courant naît éloigné du milieu rural. L’ignorance de la vie rurale, de la production agraire et de l’équilibre environnemental fait que les animaux de production - de revenu – sont affrontés aux animaux de compagnie, qui ont été tiré de leur milieu naturel pour vivre dans une atmosphère humanisée, qui ne leur correspond pas.

Beaucoup d’activités humaines à grande tradition culturelle rattachées aux animaux, faisant aujourd’hui partie du monde des loisirs, sont menacées par l’intransigeance des animalistes. La chasse, la pêche, la tauromachie, les cirques, les zoos … sont le point de mire des antis qui, sans être nombreux, sont bien organisés et généreusement financés par de grands groupes internationaux.

Dans ces derniers temps il y a eu une grande prolifération d’associations animalistes comme la Human Society of United States, créé en 1954, avec 9,5 millions de membres dans le monde et un capital social de 350 millions de dollars, avec son bras armé, le PETA (People for the Ethical of Animals, 1980) très connu par ses apparitions médiatiques, comme par exemple, chaque année, au commencement des Sanfermines de Pampelune, les moitié nus tachés de rouge à la sauce tomate. D’autres associations comme le Vegan Straker Group (animaliste et végan ; Hollande), la Fundation Franz Weber (écologiste et animaliste ; Suisse), le CAS International (Comité Anti corrida ; Pays-Bas) … se sont aussi multipliées.

En Espagne, le PACMA (Parti Animaliste contre le Mauvais traitement Animal) prend assez de force, puisque lors des élections générales de 2015 il a recueilli 218.944 votes pour le Congrès et 1 034 617 pour le Sénat, bien que dans aucune des deux chambres il n’ait obtenu de représentation. Cependant, il a convoqué une manifestation le 10 septembre de 2016 à Madrid avec un large appui médiatique à laquelle environ 4 000 personnes ont participé. Le même jour, plus de 85 000 personnes ont assisté en Espagne à des corridas de taureaux, en payant leurs entrée et, dans la seule Communauté Valencienne, les populaires bous al Carrer ont attiré 105 000 spectateurs. Dans cet esprit, il y a eu à Valence, le 15 mars 2016, une grande manifestation pour la défense de la Tauromachie, qui a réuni plus de 40 000 personnes.

Le nouveau mouvement animaliste à caractère mondial va contre n’importe quelle activité humaine à grande tradition culturelle impliquant des animaux, non seulement celles qui sont rattachées aux loisirs, comme la propre production d’élevage, dont beaucoup de millions d’emplois dépendent dans le monde (1 700 millions d’emplois directs et 700 millions indirects), mais menace aussi les millions de tonnes de tous les produits nécessaires d’origine animale pour alimenter l’espèce humaine.

La Tauromachie ne devrait pas préoccuper spécialement le mouvement animaliste parce qu’elle représente très peu dans le contexte socio-économique, seulement huit pays dans le monde célèbrent des spectacles taurins, avec peu de répercussion économique. Elle a, cependant, un grand effet par la présence de la mort dans l’arène qu’ils utilisent comme déclencheur de beaucoup de protestations animalistes. Un petit succès contre les taureaux a une grande répercussion médiatique qui donne bonne conscience aux intransigeants. Les mouvements antitaurins ne comprennent pas qu’ils sont manipulés pour la grande cause animaliste de portée internationale qui prétend transformer le monde. Encore une fois l’hypocrisie apparaît dans le comportement des animalistes.

Les partis populistes espagnols, Podemos spécialement, dans leurs débuts se sont déclarés contre la Fête des taureaux.

Ensuite, ils se sont rendus compte que proposer l’interdiction des taureaux dans leurs programmes électoraux leur enlevait des votants tant est grand l’enracinement populaire des taureaux en Espagne, à nouveau l’hypocrisie. Le grand danger en Espagne pourrait venir de la couleur politique du Congrès des Députés, où une loi contre la tauromachie serait très nuisible à la Fête. En France, de même, la modification du code civil du 28 février 2015 dit que « les animaux en tant qu’êtres vivants ne sont plus des biens meubles mais des êtres sensibles » (NDLR : amendement Glavany). Une question importante : les animaux sauvages sont-ils des animaux sensibles ?

Il y a eu, au long des dernières décennies, des agissements d’hommes politiques importants qui révèlent l’hypocrisie de ceux qui attaquent les taureaux. Le nazi allemand Heinrich Himmler est sorti de Las Ventas (Madrid, 1940) effrayé par le sang et la souffrance des taureaux dans l’arène, lui qui avait ordonné le gazage de milliers et de milliers de personnes. Le précédent maire de Bogotá, Gustavo Petro, un ancien guérillero du mouvement M-19 a interdit les taureaux dans l’arène Sainte-Marie de la capitale, parce qu’il voulait réserver à l’arène des activités de vie et non de mort, en faire un espace de culture et de liberté. Quand le conseil municipal de Barcelone a remis la médaille d’or de la ville au toréador catalan Joaquín Bernardó il a dit que « ceux que nient le tradition taurine de Barcelone, ne connaissent pas l’histoire de la ville ».

L’actuelle mairesse de Barcelone Ada Colau (une indépendantiste et “podemiste”) dit qu’elle ne va pas respecter la résolution du Tribunal Constitutionnel contre l’abolition des courses de taureaux en Catalogne …

Ce qui reste aux aficionados devant les attaques c’est de défendre la Tauromachie parce qu’elle est grande, héroïque, admirable, cultivée, légale et, surtout, gravée dans l’ADN d’un grand nombre des Espagnols. De plus, les aficionados nous sommes, avec les éleveurs ceux qui aimons le plus le taureau brave, nous sommes beaucoup plus nombreux que les « antis » et, surtout, nous ne sommes pas des assassins. N’ayons pas de peurs et de complexes, mais au contraire, une conviction et une détermination à l’heure de défendre la Tauromachie.

Antonio Purroy Unanua (Pampelune)

Voir le texte original en espagnol